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LA REFORME DU DROIT DES CONTRATS par Morgan Jamet
18 février 2017

L’INCIDENCE DU CARACTERE D’ORDRE PUBLIC DU DEVOIR PRECONTRACTUEL D’INFORMATION SUR L’APPLICATION DANS LE TEMPS DE L’ARTICLE 1112

La réforme du droit des contrats n’a pas seulement instauré, au travers du nouvel article 1112-1 du Code civil, un devoir général précontractuel d’information, mais en a expressément consacré le caractère d’ordre public.

Or ledit caractère d’ordre public peut poser la question de l’application dans le temps des dispositions de l’article 1112-1 du Code civil.

·        La consécration et la généralisation du devoir précontractuel d’information

Le nouvel article 1112-1 du Code civil consacre le devoir précontractuel d’information progressivement établi par la jurisprudence.

Est instauré un devoir général d’information pesant, dans tout type de contrat, sur toute partie qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre, dès lors que celle-ci, légitimement, ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant.

Ce devoir ne remettant pas en cause le devoir spécifique d’information susceptible de devoir être respecté en vertu d’une règlementation particulière.

 ·        L’affirmation du caractère d’ordre public du devoir précontractuel d’information

L’article 1112-1 du Code civil prévoit expressément que les parties ne peuvent ni limiter, ni exclure ce devoir, ce dont il peut être déduit son caractère d’ordre public.

Une telle disposition conduit à considérer que serait privée d’effet toute stipulation d’un avant-contrat ou d’un contrat qui tendrait remettre en cause a priori ou a posteriori l’obligation qu’une partie devrait ou aurait dû assumer à l’égard de l’autre au stade des négociations.

La sanction du non-respect du devoir d’information ayant vocation à être la réparation du préjudice subi par le créancier de ladite obligation ainsi que l’annulation éventuelle du contrat dès lors qu’en aurait par ailleurs résulté un vice du consentement dudit créancier.

·        L’application dans le temps des dispositions de l’article 1112-1 du Code civil au regard de l’ordonnance du 10 février 2016 

L’application dans le temps des nouvelles dispositions du Code civil est régie par l’article 9 de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations qui prévoit principalement :

-      Une entrée en vigueur des dispositions de l’ordonnance le 1er octobre 2016 ;

-      Le fait que les contrats conclus avant cette date demeurent soumis à la loi ancienne ;

-      Que lorsqu'une instance a été introduite avant l'entrée en vigueur de l’ordonnance, l'action est poursuivie et jugée conformément à la loi ancienne.

Les dispositions de l’article 1112-1 du Code civil issues de l’ordonnance ne paraissent pas déroger à ce principe.

·        L’incidence du caractère d’ordre public des dispositions de l’article 1112-1 du Code civil

Un arrêt rendu par la 3ème chambre civile de la cour de cassation le 9 février 2017 (numéro de pourvoi 16-10.350) permet d’illustrer la problématique.

Aux termes de l’arrêt en cause, la cour de cassation considère, dans le cadre d’un contentieux relatif à des baux commerciaux conclus avant l’entrée en vigueur de nouvelles dispositions du Code de commerce, que celles-ci, d’ordre public, devaient être appliquées immédiatement aux contrats en cours.

La cour de cassation rend sa décision en indiquant que l’article en cause, « d’ordre public, s’applique aux baux en cours au jour de son entrée en vigueur ».

Cette décision s’inscrit dans un courant de décisions aux termes desquelles la cour de cassation a admis, par dérogation au principe inverse, qu’une loi nouvelle, en raison de son caractère d’ordre public, puisse régir les effets de contrats conclus antérieurement à son entrée en vigueur.

On peut imaginer que l’application d’une telle solution puisse être revendiquée s’agissant des dispositions de l’article 1112-1 du Code civil à propos de contrats ayant été conclus avant le 1er octobre 2016.

Ceci pourrait conduire non seulement à l’application du devoir général d’information instauré à des situations antérieures au 1er octobre 2016 mais également à la remise en cause, dans des contrats conclus avant cette date, de clauses dont il serait considéré qu’elles ont eu pour objet ou pour effet de limiter ou d’exclure celui-ci.  

Si une telle problématique se pose à propos du devoir d’information, elle se posera peut-être avec encore plus d’acuité à propos de l’obligation de se comporter de bonne foi, consacrée à l’article 1104 du Code civil, également d’ordre public.

Reste à savoir si leur seul caractère d'ordre public pourra conduire à une application rétroactive de ces dispositions.

Lien vers l’arrêt rendu le 9 février 2017

https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/troisieme_chambre_civile_572/180_9_36099.html

Lien vers une publication de la cour de cassation sur le sujet de l’application de la loi dans le temps

https://www.courdecassation.fr/publications_26/rapport_annuel_36/rapport_2014_7040/livre_3_etude_temps_7047/droit_prise_7197/caractere_evolutif_7198/cour_cassation_31948.html

 

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