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LA REFORME DU DROIT DES CONTRATS par Morgan Jamet
27 novembre 2016

ETRE OU NE PAS ETRE … DE BONNE FOI, LA EST LA QUESTION

Si l’on peut dire qu’il y un avant et un après la réforme droit des contrats, c’est certainement quant à la prise en considération de la bonne foi des parties.

Celles-ci ne pouvaient certainement déjà, avant la réécriture du Code civil, se comporter n’importe comment l’une à l’égard de l’autre, car de nombreux dispositifs correctifs existaient déjà.

Mais la réforme du droit des contrats, poursuivant un objectif moralisateur indéniable et tendant à favoriser la justice contractuelle, a consacré la notion de bonne foi comme jamais elle ne l’avait été jusqu’alors.

Et cela pourrait bien donner un nouvel élan tant à l’invocation de celle-ci par les parties qu’à son recours par les juges pour motiver leurs décisions.

L’article 1104 du Code civil, en prévoyant en son premier alinéa que « Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi » a tout d’abord introduit un devoir général, pesant sur chacune des parties au contrat et ce à tous stades de la vie de celui-ci.

L’alinéa 2 du même article, selon lequel « cette disposition est d’ordre public » a par ailleurs expressément érigé l’obligation de se comporter de bonne foi en devoir absolu, étant rappelé que l’article 1104 figure dans les dispositions préliminaires du sous-titre du Code civil désormais consacré aux contrats et que l’article 1102, qui consacre lui-même le principe de la liberté contractuelle, prévoit que celle-ci « ne permet pas de déroger aux règles qui intéressent l’ordre public » et donc à ce devoir.

Nul ne peut donc désormais ignorer qu’il convient de se comporter de bonne foi dans le contexte contractuel !

Il est cependant bien dommage que nulle définition de la bonne foi n’ait été donnée à cette occasion, comme si l’appréciation de l’obligation d’en faire preuve devait procéder d’une forme d’intuition naturelle que chacun serait susceptible de ressentir en son for intérieur.

Si certains des contours de la notion ont pu être dessinés à l’occasion de décisions judiciaires, qui permettent de comprendre qu’il s’agirait de ne pas commettre d’abus à l’égard de l’autre partie, de se comporter raisonnablement, modérément, avec loyauté et honnêteté, elle demeure floue et peu facilement appréhendable en pratique.

Sachant qu’au-delà de la définition de la notion, peut se poser la question de sa graduation ; la mauvaise foi pouvant être plus ou moins caractérisée, le comportement d’une partie étant susceptible de ne pas se résumer à une seule composante.

Les juges ont vocation à apprécier le respect du devoir de se comporter de bonne foi en tenant compte de l’ensemble de la situation leur étant soumise et en définissant le comportement qu’aurait dû avoir une partie, ce qui peut procéder d’une analyse subjective.

L’enjeu que représente la bonne foi est certainement devenu plus important qu’auparavant.

Tout d’abord parce que la bonne foi est supposée concerner tous les aspects du régime du contrat.

Elle doit donc animer tous comportements des parties, y compris pour permettre l’invocation par elles de règles protectrices tendant à sanctionner le fait de l’autre.

Ensuite parce qu’elle constitue une limite importante à la liberté contractuelle.

A cet égard la question que pourrait poser l’article 1104 du Code civil est de savoir si certaines nouvelles dispositions, afférentes au traitement de diverses problématiques, à tous les stades de la vie du contrat, nonobstant leur caractère supplétif de volonté et donc la possibilité pour les parties d’y déroger, ne reposent pas implicitement sur le devoir de se comporter de bonne foi et n’autorisent dès lors pas les parties à y déroger en toutes circonstances.

Si certains dispositifs, tels notamment ceux prohibant l’abus de l’état de dépendance, de toute clause privant de sa substance l’obligation essentielle du débiteur ou encore, dans les contrats d’adhésion, des clauses créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, constituent des limites particulières à la liberté contractuelle, l’obligation de se comporter de bonne foi, à tous stades de la vie du contrat, pourrait bien constituer une limite générale.

Indéniablement le Code pourrait tendre désormais à obliger les parties au contrat à un examen de conscience permanent.

Morgan Jamet

Avocat

Arst Avocats

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